Patrimoine - Genève

Fin de suspense pour le site historique de Compesières

Le fief genevois des chevaliers de l’Ordre de Malte, à Bardonnex, est enfin fixé sur son destin architectural. Les autorités cantonales ont pris leur décision.

Le site comprend, outre la «commanderie», l'église et une école
Le site comprend, outre la «commanderie», l'église et une école - Copyright (c) Francis Haller
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Tout arrive à ceux qui savent attendre. Et de la patience, il en a fallu aux habitants de Bardonnex, l’une des 45 communes genevoises aux 2388 âmes, nichées sur une superficie de 500 hectares. Depuis 2009, leur municipalité menait des pourparlers avec les autorités cantonales sur les possibilités de nouveaux aménagements sur le site hautement symbolique de Compesières. Le premier projet de plan verra le jour en 2011 et subira quatre modifications en seulement six ans. Puis, en novembre dernier, soit douze ans après le début des consultations avec la commune de Bardonnex, l’Etat de Genève a fini par approuver le dernier plan, très attendu, relatif à l’avenir de ce petit morceau du patrimoine historique du canton.

Un peu d’histoire

Avant de faire partie de Bardonnex, Compesières fut une commune à part entière. Savoyarde, elle a été cédée à la République de Genève par le Royaume de France en 1816. Sa célèbre bâtisse connue sous le nom «commanderie» serait, selon les sources historiques, d’abord une église catholique romane. Construite sur une position géographique dominante, elle permettait d’avoir un œil sur Genève. Dédiée à saint Sylvestre et datant du XIIIe siecle, l’édifice sera offert à l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem qui en fera un hospice.
Dans les années 1800, le lieu est investi par les chevaliers de l’Ordre de Malte dont plusieurs seront par la suite enterrés sur place. Après l’annexion, en 1816, de Compesières à la cité de Calvin, la commanderie devient une mairie en 1822, alors que son église catholique est reconstruite en 1834. Le bâtiment de la première école hors de la commanderie viendra s’ajouter au site en 1899. A eux trois, ces constructions composent le cœur historique du site de Compesières et témoignent d’un passé pré-helvétique plutôt agité. C’est donc sur leur destin architectural que l’Etat de Genève vient de statuer.

Conserver et... construire

Béatrice Guex-Crosier, maire de Bardonnexdiaporama
Béatrice Guex-Crosier, maire de Bardonnex

Les autorités genevoises, qui ont décidé de préserver le centre historique de Compesières, ont également veillé à définir toutes les modalités de ses évolutions territoriales futures. Pierre Alain Girard, directeur général de l’Office du patrimoine et des sites (OPS) explique: «Avant 2018, le périmètre du plan de ce site était entièrement en zone agricole. Or, il ne peut y avoir de chantier de construction sur ce type de terrain considéré hors à bâtir. Une modification a été alors apportée par les autorités à la réglementation qui a scindé ce territoire en quatre zones. La première, avec des bâtisses patrimoniales, est la zone protégée où les constructions anciennes doivent être maintenues. Suit la deuxième, dédiée aux activités sportives. La troisième, elle, est affectée à la verdure et le cimetière de la commune en fait partie. Finalement, la quatrième zone a été définie comme étant un périmètre pour des équipements publics, comme l’école.»

Ces définitions poursuivent l’objectif d’identifier clairement les parcelles sur lesquelles il sera possible ou pas de bâtir à l’avenir. Une clarification saluée par Béatrice Guex-Crosier, la maire de Bardonnex, qui confie: «L’adoption de ce plan de site nous permettra d’avoir un équilibre entre la conservation du patrimoine et les besoins de la commune. Parmi nos projets, celui d’une nouvelle école dont la demande de l’autorisation de construire sera déposée début 2022. Nous espérons l’ouverture de ce bâtiment scolaire pour la rentrée 2024.»

Sites patrimoniaux protégés

Une redistribution des affectations fait également partie de ce plan. Ainsi, l’auberge communale actuelle sera déplacée dans le bâtiment de la ferme tandis que la garderie et les locaux parascolaires, eux, seront installés dans les dépendances de la ferme. Contrairement au hangar communal, les bâtiments provisoires de quatre salles de classe construits dans la zone agricole seront, eux, démolis. Idem pour ce qui est d’autres bâtisses inoccupées et sans intérêt patrimoniaux. Concernant les créations, un jardin potager historique sera recréé au nord de la ferme, entre autres.
A noter que si les plans de sites cantonaux sont généralement salués par les communes, certaines d’entre elles sont parfois moins enthousiastes quant à l'inscription de ces objets patrimoniaux dans l’inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger (ISOS). Une réticence qui s’explique par la crainte de ne pas avoir les coudées franches lors de nouveaux projets de construction. Pour ce qui concerne Compesières, la commune s’y était opposée et la réduction du périmètre du plan de site demandée par le Grand Conseil fera perdre sa valeur nationale lors de la prochaine révision de l’ISOS.