Du solaire sur tous les toits, une fausse bonne idée
Le 18 mai prochain, la population genevoise se prononcera sur l’initiative «Pour une transition rapide vers le solaire à Genève» (IN 191) et son contreprojet «Dynamisons la production d’énergies renouvelables». Ce vote s’inscrit dans un contexte d’urgence climatique, où la question n’est plus de savoir s’il faut agir, mais comment le faire intelligemment.

L’initiative impose l’installation de panneaux photovoltaïques sur toutes les surfaces des bâtiments, tandis que le contre-projet propose une approche plus ciblée, tenant compte des contraintes techniques et économiques du canton. Il s’agit d’optimiser les efforts plutôt que de les généraliser aveuglément.
Pour l’USPI Genève, qui regroupe des professionnels de la gestion immobilière, la transition énergétique est une priorité, mais elle doit être menée avec méthode et selon un phasage clair.
«Il faut s’occuper de l’isolation, puis du chauffage, et enfin du solaire. Cette initiative, dite «énergie durable», est racoleuse et n’est pas réalisable techniquement», souligne Bruno Frisa, architecte spécialiste des rénovations durables et membre de la commission technique de l’USPI Genève.
Une multitude d’échafaudages
Toute installation requiert la mise en place d’échafaudages sur les façades et toitures. «Les panneaux ne représentent qu’un tiers du coût final, les deux autres tiers concernent les travaux préparatoires », rappelle Bruno Frisa. Généraliser leur pose sans distinction entraînerait des coûts disproportionnés et des démarches complexes. De plus, certaines toitures ne sont ni orientées ni dimensionnées pour accueillir des panneaux, ce qui rend l’obligation inefficace.
Cibler les obligations et inciter
Le contre-projet cible les toitures les plus adaptées, comme celles des bâtiments industriels, administratifs ou en rénovation. Il concentre les efforts sur les surfaces les plus productives, évitant ainsi l’éparpillement des ressources. «Nous encourageons les propriétaires à se faire conseiller par un membre de l’USPI Genève pour investir sereinement dans une rénovation énergétique performante», souligne Simon Reichen, Secrétaire général de l’association.
Le solaire thermique: une complémentarité stratégique
Contrairement à l’initiative, le contre-projet introduit le solaire thermique, particulièrement pertinent pour la production d’eau chaude sanitaire dans les bâtiments résidentiels. Cette technologie, encore trop peu mise en valeur, pourrait couvrir une part significative des besoins en énergie des immeubles d'habitation. «Le solaire thermique est efficace, moins gourmand en matières premières, et répond à un besoin constant sans devoir surdimensionner les installations», précise Bruno Frisa.
Une approche connectée aux réalités du terrain
Le marché genevois fait face à des défis concrets: pénurie de main-d’oeuvre, complexité administrative, contraintes structurelles. «Un bâtiment industriel est mieux adapté: il offre des toits plats et de grandes surfaces, optimisant ainsi la puissance électrique», explique Bruno Frisa. En hiérarchisant les priorités et en concentrant les efforts là où le potentiel est réel, le contre-projet s’inscrit dans une logique durable, applicable rapidement.
Pour l’USPI Genève, le contre-projet représente la voie la plus réaliste pour une transition énergétique efficace, en phase avec les enjeux du terrain et les capacités du parc immobilier genevois. C’est une trajectoire qui respecte les spécificités locales, tout en s’inscrivant dans les objectifs climatiques globaux.