La peinture écologique, les privés s’y mettent
Privilégier la peinture écologique, c’est possible. Enduit à l’argile, peinture au lait, huile de lin remplacent des compositions issues de la pétrochimie. Mais comment les trouver et qui les utilisent?
Les professionnels l’appelaient la végane de la peinture. Depuis quatre ans, Christelle Billaud a totalement éliminé les solvants de sa gamme de peinture. « Je ne voulais plus travailler avec des peintures avec des solvants, qui sentent mauvais, obligent à mettre un masque, à jeter l’outillage et polluent les sols » explique la peintre neuchâteloise qui restaure en ce moment le château de Vaumarcus.
La fondatrice de Ça Roule Peinture est donc allée chercher des recettes de peintures anciennes, naturelles, sans biocides (plomb, cobalt) ni composés organiques volatiles (COV). Ceux-ci terminent dans la nappe phréatique ou sont respirés par les habitants des espaces repeints.
Recettes séculaires
« Je fais mes propres mélanges, ajoute-t-elle. Par exemple à base de poudre de lait ou de séré, d’eau, de pigments et de bicarbonate. Ce sont des peintures qu’on applique sans tarder, car leur vie en pot est courte. Ainsi, on n’a pas de déchets polluants. » Le rendu sur des boiseries à l’intérieur est excellent. Cela vieillit bien, sans odeur, avec une belle patine, gardant la luminosité des couleurs.
Même en extérieur, des recettes datant du Moyen-Age, voire de l’époque romaine, reviennent au goût du jour. Récemment, Christelle Billaud a proposé la peinture à la farine à un apiculteur souhaitant imprégner ses ruches de manière écologique. « Cette composition est plus délicate à réaliser car il faut la cuire, mais elle ne perturbera pas les abeilles. C’est aussi valable pour les barrières en bois, à la place du Bondex ou autre produit de la pétrochimie qui résistent mal aux UV », observe celle qui se fournit également auprès de spécialistes de peintures durables déjà prêtes.
Label environnemental
Pour s’orienter, la cheffe d’entreprise et d’autres peintres engagés conseillent l’étiquette environnementale de la Fondation Suisse Couleur, classant les peintures de A à G. Les produits G sont les pires pour l’environnement et la santé, tandis que les A contiennent au minimum 95 % de matières renouvelables.
Les gens veulent savoir ce qui est appliqué chez eux. Ils sont les principaux moteurs de ces demandes, de même que les crèches ou les hôpitaux. L’association La Maison Nature regroupe des professionnels de l’habitat durable, informe et organise régulièrement des conférences en Suisse romande sur les matériaux durables (comme, par exemple, le 4 mai à Genève).
Le Gétaz romand bio
Membre de celle-ci, l’entreprise vaudoise Meige Matériaux milite depuis 13 ans pour une prise de conscience des milieux de la construction. « Nous sommes un peu le Gétaz des matériaux bio. Nous faisons la trace en proposant de nouveaux produits écologiques. Mais dès qu’un matériau marche, on le perd car il est repris et revendu par des grossistes » explique Aurore Meige, la cofondatrice de la Sàrl. Elle déplore cependant le manque d’engouement des grandes entreprises de la construction pour les peintures naturelles. « Au détriment de la planète et de la santé de tous», souligne-t-elle. Pourtant, la différence de prix n’est pas si importante ; de l’ordre de 10 à 20% de plus. Le Centre Pro Natura à Yverdon a fait ce choix.
Utiliser une peinture dite écologique, c’est donc privilégier des liants tels que l’huile de lin, de bois ou de ricin et les solvants tels que l’eau, l’essence de térébenthine, l’alcool, en éradiquant les siccatifs (activateurs de séchage) et les biocides.
Quelles options?
Les alternatives aux peintures synthétiques existent en nombre. En voici une liste non exhaustive.
Peinture minérale à la chaux. Elle est sans solvants, hygiénique et antibactérienne, idéale pour les façades.
Peinture à l’argile. Son pouvoir couvrant est excellent. L’énergie grise est presque nulle, surtout si on le fabrique soi-même.
Peinture à la farine. Elle demande une préparation plus complexe, mais est anti-UV et anti-moisissure.
Huile de lin. Saine et biodégradable, elle donne au bois un aspect lustré. Attention, elle est inflammable. Il faut y ajouter de la térébenthine.
Essence de térébenthine. On obtient ce solvant en distillant de la résine de pin.
Encaustique. C’est un mélange pour le bois, fait de cire d’abeilles et de térébenthine.
Sel de bore. On l’utilise pour traiter préventivement contre les incendies, les insectes xylophages et les champignons.