Urbanisme

Le cas de "L'Oasis" Belle-Terre

Si la question des rez-de-chaussée se pose, c’est avant tout pour les nouveaux quartiers excentrés. Exemple avec Belle-Terre à Thônex.

A Belle-Terre, le Comptoir Immobilier a travaillé avec une sociologue spécialisée dans les questions urbaines
A Belle-Terre, le Comptoir Immobilier a travaillé avec une sociologue spécialisée dans les questions urbaines - Copyright (c) DR
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« Dans les plans localisés finalisés, voici quinze ans, l‘Etat faisait encore de l’urbanisme économique, à cause des plans financiers. L’Office financier du logement allait même jusqu’à recommander les longueurs et les largeurs des bâtiments. Nous avons vu quelles catastrophes cela a déjà donné, avec des rez-de-chaussée quasi inactifs», observe Yannos Ioannides, responsable des développements immobiliers au sein du Groupe Comptoir Immobilier. Heureusement que l’introduction d’une grille Qualité a permis une nouvelle approche. Avec le choix fait à Belle-Terre de sup- primer la voiture du paysage, les rez-de-chaussée deviennent une sorte d’interface modal. Un lieu de tous les échanges. «Nous avons travaillé avec la sociologue Sonia Lavadinho, spécialiste de ces questions avec son laboratoire Bfluid, pour faire en sorte que les gens se croisent au rez-de-chaussée. Il y avait un enjeu de qualité d’usage», relève Yannos Ioannides.

Expérimentation comportementale

Si l’on enlève les circulations verticales, les locaux pour les vélos ou même les buanderies, il ne reste au mieux que 50% des surfaces des rez pour les commerces. «Avec cette expérience-là, nous nous sommes rendus à l'évidence que nos amis nordiques ont beaucoup d’avance sur nous et qu’il faut passer par l’expérimentation comportementale pour aboutir à un projet qui valorise l’usage des rez-de-chaussée», constate- t-il. La strate relevant du vivre ensemble est habituellement laissée aux services sociaux. Comme le dit très justement Yannos Ioannides: «Les politiques publiques ne sont pas convergentes. La méthodologie de travail reste celle du fonctionnement en silo, avec en plus un éparpillement des compétences entre le canton, les communes et les privés. Généralement, on ne sait pas où mettre la culture, sans parler du cultuel (églises, cimetières, etc.)».

Le premier enseignement restitué par l’équipe du Comptoir Immobilier est que ce n’est pas parce que l’on va saturer les rez-de-chaussée avec de nombreuses activités que cela fonctionnera pour créer une identité locale et du lien social. Le loyer ne représente par ailleurs qu’une partie du coût. «Nous sommes dans le fantasme de la ville du Moyen- Âge.»

Connecter le collectif

Œuvrant à la 2ème étape de Belle-Terre (qui prévoit la construction de près de 1000 logements et d’équipements publics), Jorge Balladares fait la constatation qu’il va falloir mieux se connecter avec les riverains, comme le complexe hospitalier de Belle-Idée. «Il y a des petits cheminements qui se développent. Ce lieu doit prendre son identité. Tout nous ramène à la question de l’échelle: ici le lieu est grand et l’on se sent petit». Le Bioparc fondé par Pierre Challandes à Bellevue va s’y établir dans un futur proche. Le lieu sera ainsi moins à l’écart.

«Il peut y avoir besoin d’ateliers ou de services, mais ceux-ci n’ont pas forcément vocation à être toujours au rez-de-chaussée. La ville est faite d’évolutions permanentes. D’autant qu’il ne faut pas oublier l’enjeu climatique. A Athènes, lorsque la température dans la rue est de 44°, il n’y a plus personne dans les rues. Je préconise une méthodologie du décloisonnement et d’ambitions partagées, notamment au sein des administrations», ajoute Yannos Ioannides.

A Belle-Terre, depuis que les habitants se sont installés (1500), il y a déjà eu 50 naissances. «Nous y avons expérimenté une agence de quartier qui attire pas mal d’habitants. La demande est très forte. Elle organise aussi une certaine animation dans ce quartier, en partenariat avec les services communaux. Elle propose différents services de 07h30 à 18h30. Cette proximité a permis de diviser par deux les contentieux. Cette agence est vécue comme une loge de super concierge». Par ailleurs, lors de la seconde étape, un bâtiment orienté santé va surgir, de quoi amener une certaine animation.