Immobilier

Le réemploi du béton n’est pas du recyclage

Il ne faut pas confondre deux notions totalement différentes : le réemploi et le recyclage. Les explications de Francesco Della Casa, architecte cantonal genevois.

Scie à béton
Scie à béton
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Qu'est-ce que le réemploi ?

« Le réemploi est une méthode de déconstruction et de reconstruction. Ce n’est pas le cas du recyclage », précise d’emblée l’architecte cantonal genevois Francesco Della Casa. « Employer une nouvelle fois signifie que l’on garde la matière et la forme pour un nouvel usage. Le réemploi se soucie des conditions d’approvisionnement et du devenir des déchets. Il se préoccupe de l’épuisement des ressources, il inclut les coûts externes et tout le cycle de vie des matériaux. Il fait en sorte, par exemple, que des éléments de béton récupérés soient découpés à la scie et réassemblés pour devenir les éléments préfabriqués du futur. »

Commencer par la fin

« C’est la préfabrication en réemploi qui le caractérise. Il a pour objectif la mise en place de filières de récupération et la diminution des déchets. En revanche, le recyclage intervient uniquement lorsque le réemploi ne s’avère plus possible. Et il ne se soucie pas de ce réassemblage. »

« Avec le changement climatique, l’ours blanc voit fondre sa banquise. Les professionnels du bâtiment doivent eux aussi anticiper la fin d’une rente de situation liée à l’idée que les matériaux seraient une ressource illimitée. Mais le réemploi exige de commencer par la fin, soit un renversement de l’optique habituelle : auparavant, on calculait d’abord le coût d’un projet d’immeuble sans le bilan carbone, puis on pouvait calculer le bilan carbone en aval. Avec la future loi genevoise sur le CO2 (lire encadré), on commence par la fin : on prend pour point de départ le bilan carbone visé, puis on fait les calculs en amont pour y arriver », résume Francesco Della Casa.

Rappelons qu’afin de réduire sa forte dépendance aux ressources importées due à l’exiguïté de son territoire, Genève est le premier canton suisse à avoir introduit l’écologie industrielle de manière explicite dans sa Constitution et dans sa loi cantonale sur l’énergie.

Quid de la taxe de mise en décharge ?

« Saviez-vous qu’en raison de cette exiguïté, la taxe de mise en décharge du canton de Genève est la plus chère de Suisse, le canton de Bâle-Ville venant au deuxième rang ? Sur cinq millions de tonnes de déchets produits par an, quatre millions et demie sont dues au secteur du bâtiment, excavations comprises. Que faire contre le renchérissement continuel des coûts d’élimination des déchets ? En produire beaucoup moins ! » Cela passe notamment par le fait de privilégier le réemploi et d’accélérer les travaux de rénovation du parc immobilier du canton. « Car nous ne pouvons plus nous contenter d’exporter nos problèmes de logement et de déchets en France voisine et dans le canton de Vaud. »