Loi sur l'énergie: "Genève ne sera pas inondée d'échafaudages"
En application depuis le 1er septembre dernier mais pas encore limpide pour tous, la nouvelle réglementation du bâti genevois implique de grands changements pour les propriétaires. Explications.

Pas moins de 60% du parc bâti, autrement dit 29’000 bâtiments sont impactés par le nouveau règlement d’application de la loi sur l’énergie, entré en vigueur l’an dernier. Au menu: un abaissement du seuil de l’IDC (indice de dépense de chaleur) des bâtiments à 450 MJ/m2/an et un non-remplacement des chaudières à mazout/gaz. Des mesures ayant fait grand bruit lors de leur annonce mais qui restent depuis mécomprises par nombre de propriétaires. Cédric Petitjean, directeur de l’Office cantonal de l’énergie (OCEN), revient en détail sur ce qui a été mis en place.
Qu’est-ce qui a concrètement changé depuis le 1er septembre?
Désormais, tous les bâtiments dotés d’un IDC supérieur à 450 MJ/m2/an sont en non-conformité avec la loi. Afin de donner une prévisibilité aux propriétaires et aux professionnels, nous avons fixé des paliers de priorités d’action. La loi fixe un dépassement significatif pour les IDC supérieurs à 800 MJ/m2/an, ce qui implique que ces bâtiments seront les premiers à entamer des travaux et devront engager des rénovations lourdes rapidement. Puis, ce sera au tour de ceux dont l’IDC se situe entre 600 et 800 MJ/m2/ an d’agir. Ils devront fournir des efforts par mesures ponctuelles (les fenêtres, le toit...). Enfin, restent les édifices dont l’IDC oscille entre 450 et 600 MJ/m2/an, qui devront simplement effectuer de l’optimisation énergétique (équilibrage, désembuage des radiateurs...). Comme vous pouvez le voir, avec ce dispositif, tout ne passe pas par de la rénovation. On parle ici de 400 bâtiments à rénover, donc Genève ne sera pas inondée d’échafaudages. Autre nouveauté réglementaire: le recours aux énergies renouvelables ou à la récupération de chaleur lors du changement de chaudières devient la norme.
Quelles aides sont prévues pour les propriétaires?
Il est clair que les propriétaires vont devoir participer au financement de cette transition énergétique mais ils peuvent en outre s’appuyer sur le Programme Bâtiments de la Confédération qui est le levier d’aide financière classique. Toutes les subventions disponibles à Genève sont à consulter sur le site www.ge-energie.ch. Le Conseil d’État a également déposé un projet de loi de 200 millions au Grand Conseil pour soutenir ces rénovations. Il y a en outre des dispositifs fiscaux qui ont été mis en place. Précision: cette planification des travaux s’étale sur plusieurs années, selon la taille du parc, afin de s’assurer que chaque franc soit investi au bon endroit. Aujourd’hui nous avons aussi dématérialisé les processus de demande d’autorisation pour les systèmes de chauffage afin que les professionnels puissent le faire en ligne et que la procédure soit simplifiée, donc plus rapide.
Faites-vous une différence de traitement entre l’immeuble de 15 étages et la petite villa individuelle?
Tout à fait, en réalité il y a deux dispositifs différents. Pour les propriétaires de plus de 5 preneurs de chaleur, cela fait dix ans qu’ils connaissent l’IDC et nous les accompagnons d’ores et déjà dans le cadre de l’action GEnergie. En ce qui concerne les bâtiments de moins de 5 preneurs de chaleur (petits collectifs, villas, etc.) qui n’ont bien souvent jamais entendu parler de l’IDC, l’obligation d’assainir ne les frappe pas dès 2023. Nous allons d’abord communiquer et les informer pendant trois ans, que ce soit à travers les associations immobilières, les médias ou par courrier, puis une fois préparés, nous rentrerons dans la mise en place d’actions. Des programmes ciblés comme visite-villas de SIG vont être spécifiquement déployés dans ce but.
Depuis septembre, la machine s’est-elle mise en route, observe-t-on déjà du concret?
Même si quelqu’un a enclenché le processus pour son projet de rénovation lourde au 1er septembre 2022, nous n’observerons pas de résultat avant 2026. Vu ces temps longs, il fallait instaurer des mesures drastiques. Cependant, avec l’entrée en vigueur de ce nouveau règlement, nous avons observé une forte hausse des demandes de subventions pour des analyses CECB+. Cela veut dire que les propriétaires commencent à anticiper et ont pris conscience qu’il fallait cartographier leur parc pour prioriser leurs travaux.