Construction - Vaud

Privilégier la rénovation pour lutter contre le réchauffement climatique

Le secteur du bâtiment génère un tiers des émissions de CO2. Nettement trop, estime le Canton de Vaud qui parraine une étude de spécialistes intitulée "Jalons", la 14e du genre.

En améliorant l'isolation des bâtiments, on pourrait diminuer de 60 à 70% la consommation d'énergie
En améliorant l'isolation des bâtiments, on pourrait diminuer de 60 à 70% la consommation d'énergie - Copyright (c) LDD
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La construction constitue notre levier le plus important pour atteindre la neutralité carbone, assure la Verte Béatrice Métraux, chargée du Département de l’environnement et de sécurité. A l’heure des défis climatiques, le secteur du bâtiment représente 40% de la consommation d’énergie et environ un tiers des émissions de CO2.» C’est trop, selon le Canton de Vaud qui livre ses pistes dans l’ouvrage «Jalons 14 Vivre Plus Mieux». Le défi est considérable, à la hauteur de l’imposant parc immobilier vaudois. Il compte 180'000 bâtiments dont quatre sur cinq ont été construits avant 1990 et deux sur trois sont encore chauffés aux énergies fossiles. «L’assainissement des bâtiments existants constitue l’arme principale pour réduire l’impact environnemental», détaille Yves Golay-Fleurdelys, adjoint au directeur général des immeubles et du patrimoine.

Cinq objectifs

L’ambition de la Stratégie immobilière de l’Etat de Vaud devrait être étendue à l’ensemble du canton avec cinq objectifs. Tout d’abord, procéder en priorité à l’isolation des toitures et façades. En améliorant l’isolation des bâtiments, on pourrait diminuer de 60 à 70% la consommation d’énergie.

Changer ensuite la production de chaleur et maximiser les surfaces de production d’énergie solaire. Les besoins en électricité étant difficile à limiter de manière équivalente aux besoins de chaleur, les toits et façades des bâtiments doivent pouvoir produire de l’énergie solaire au maximum des possibilités.

Troisième objectif: généraliser les chauffages à distance renouvelables dans les zones urbaines et faciliter le raccorde- ment des bâtiments privés, en priorité les grands bâtiments de plus de 300 m2. A Ecublens, les principaux bâtiments communaux, des logements privés et des surfaces commerciales sont approvisionnés en énergie renouvelable par un réseau de chauffage à distance à bois. Son extension est prévue sur la commune voisine de Chavannes-près-Renens. D’ici à 2030, 30 km de conduites seront posés de façon à alimenter 3000 ménages.

Le quatrième objectif consiste à concevoir les nouveaux quartiers en imposant une connexion à des transports publics performants. Il ne suffit pas d’améliorer les espaces publics pour favoriser la mobilité. A Renens, les autorités ont construit une passerelle nommée «Rayon vert» enjambant les voies CFF de la nouvelle gare pour relier le centre-ville aux quartiers sud de la gare. Associée au futur tram Renens-Lausanne, au métro et aux lignes de bus, cette passerelle a permis de connecter deux places publiques dont profitent les usagers des transports et les habitants de la commune.

Enfin, cinquième objectif, modifier les bases légales pour permettre la généralisation d’un standard plus élevé (celui choisi par l’Etat en 2015), tout en admettant des dérogations. Ainsi à Lausanne, le Tribunal d’arrondissement à Montbenon n’a pu être assaini que sur des éléments ciblés pour préserver l’esthétique. A défaut de panneaux solaires, les fenêtres et les toitures ont été améliorées pour diminuer la consommation de chaleur et la production de CO2 de 40%.

Assainir plutôt que construire

Plus les villes sont grandes et denses, plus la proportion du territoire réservée aux surfaces vertes est importante.diaporama
Plus les villes sont grandes et denses, plus la proportion du territoire réservée aux surfaces vertes est importante.

Le bras de levier principal pour améliorer le bilan carbone du parc immobilier est sans conteste l’assainissement des bâtiments existants: avant tout les grands immeubles (d’une surface brute de plancher supérieure à 300 m2 et construits avant l’an 2000). En agissant sur 46% du parc soit 84’000 bâtiments, il est possible de viser une diminution rapide des consommations d’énergie de 50 à 70% et une réduction de 90% des émissions de CO2: «Les surfaces de terrains à bâtir sur sol vaudois n’étant pas extensibles, la densification des espaces déjà urbanisés est la seule solution viable pour trouver l’équilibre entre la préservation du paysage, le renforcement de la biodiversité et la modification des modes de déplacements. Cette densification doit se faire au profit d’une qualité de vie retrouvée», notent les auteurs de l’étude.

En quelque sorte, il s’agit de remplir les vides en hauteur (surélévation) ou en largeur (utilisation des surfaces bâties déjà légalisées). La démarche concerne également les propriétaires privés qui peuvent être aidés dans le cadre du projet pilote MétamorpHouse initié par l’Etat de Vaud. Fruit d’un partenariat entre l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et l’Etat de Vaud, la surélévation du bâtiment administratif à la rue de l’Université à Lausanne, intitulée Workingspace, se veut une démarche exemplaire dans la mesure où elle comprend le maintien de logements à loyers abordables.

Pour Pascal Broulis, chargé du Département des finances et des relations extérieures (qui chapeaute les constructions de l’Etat de Vaud), le canton n’a pas assez bâti durant ces vingt dernières années alors que le canton a crû de 220'000 habitants: «Recourir à l’avenir davantage à la filière bois et à la filière terre? Oui, mais a-t-on formé assez de spécialistes?»