Une future cité du cinéma d'animation
Il manquait à Annecy (F) un lieu digne de son statut de capitale internationale du film d'animation. Ce sera bientôt corrigé.

Comment a germé l’idée de transformer en cité du cinéma d’animation le site de l’ancien haras national - composé d’une dizaine de bâtiments classés au titre des Monuments historiques en 2007 et dont la Ville d’Annecy (France) a fait l’acquisition en 2013? Nous ne le savons pas exactement mais toujours est-il que le projet a été adopté par le conseil municipal en 2018, sous l’ancienne mandature. Le programme comportait alors trois axes: développer un pôle culturel, une halle gourmande et restaurer le parc d’une superficie de 2,5 hectares. A l’issue d’un concours d’architecture à deux tours, c’est le bureau parisien Devaux & Devaux architectes qui s’est vu confier cette réhabilitation. Celui-ci n’en est pas à son coup d’essai en la matière. Spécialisé dans la restauration du patrimoine du XXe siècle il travaille d’ailleurs actuellement, dans la région, à la réhabilitation du téléphérique du Salève. «Nous intervenons sur de tels sites avec un double enjeu: être respectueux du patrimoine qui nous a été transmis en le considérant comme une ressource, et s’autoriser à l’adapter à nos besoins actuels. Ne pas démolir et (re)construire a minima est devenu notre leitmotiv. Tous les acteurs de ce projet vont, avec nous, dans ce sens», explique David Devaux.
Les architectes ont d’emblée cherché à s’appuyer sur l’identité du site, déjà très forte, et non pas à réaliser «un bâtiment signal» qui se serait détaché de l’ensemble de ceux qui constituaient le haras. Seules deux adjonctions seront faites (pour la salle de projection et la halle gourmande, cf. plus bas). Le reste des activités sera logé dans les constructions existantes, restaurées. Dans une même idée, le parc actuel sera mis en valeur.
Nouvelles accroches urbaines
«Le projet est d’envergure internationale puisqu’il est amené à accueillir des manifestations drainant un public venu du monde entier. En même temps, il représente un enjeu majeur pour Annecy avec sa situation en hypercentre, poursuit David Devaux. L’opportunité est d’ouvrir le lieu, clos, qui tournait le dos à la ville et aux Annéciens. Depuis l’origine, nous le concevons comme un futur espace de rencontres et d’échanges pour l’ensemble de ces publics». Mais comment repenser ce morceau de ville afin qu’il profite à tous et s’insère dans le tissu urbain global? Le mur qui ceint le site sera réouvert en différents endroits: rue de la Paix pour créer un espace en relation avec la halle gourmande, et près du rond-point de l’avenue de Brogny pour avoir un accès depuis le centre Courier. L’une des connexions se fera également toujours par le portail d’honneur situé sur l’axe central, rue Guillaume Fichet. Enfin, le mur rue Jean Jaurès sera déposé. Les édifices constitueront ensuite la limite avec les espaces publics et la rue ; toute cette partie se trouvera en contre-allée, ce qui permettra d’avoir de nouvelles relations piétonnes sur cette voie.
Le projet en détail
Le pôle culturel prendra corps du côté de la rue Jean Jaurès dans deux bâtiments, accueillant pour l’un, les bureaux de la CITIA (Centre international du cinéma d’animation) et un café-boutique, et pour l’autre, une salle d’exposition permanente ainsi que des plateaux pédagogiques. Boulevard du Lycée, l’ancien manège «gardé en l’état comme témoin de l’Histoire», abritera une salle d’exposition temporaire. Un passage couvert reliera cette dernière à la salle de projection de plus de 300 places, «construite semi-enterrée, de sorte à laisser émerger les bâtiments historiques» mais aussi afin de garder une logique dans le parcours muséographique. Cette salle de projection sera vitrée dans sa partie supérieure pour «s’ouvrir à la lumière et à la vue et servir à d’autres usages pour la ville et le quartier» en dehors de la période du festival.
Côté rue de la Paix, une halle gourmande va être ouverte par le biais d’un marché couvert faisant la part belle aux produits de notre terroir. Sur une terrasse, pouvant être elle aussi couverte, le marché pourra être au besoin étendu, entre autres usages. Une place adjacente à la rue complètera l’ensemble. Les deux pôles culturel et gourmand seront séparés, au cœur du site sur l’emplacement de l’ancienne carrière, par un plan d’eau qui apportera une fraîcheur bienvenue en été, et présentera la particularité d’apparaître par différents effets (remous, résurgence, etc) avant de littéralement s’évaporer le moment choisi pour laisser la place à d’autres ambiances.
Dans ce miroir d’eau, le parc se reflètera. Le parc représente justement une autre part importante du projet. Il renaîtra comme jadis, David Devaux le confirme: «Il sera renforcé dans les endroits ayant souffert du passage du temps et dans ceux que les différentes actions successives menées dans le passé ont altérés». Dans cette logique, le péristyle végétal de l’ancienne carrière sera resouligné afin de recréer de l’ombre. Sur l’entier du site, plus d’une centaine d’arbres seront replantés ; des espèces résistantes aux sécheresses et peu gourmandes en eau. Celles-ci se marieront pour le meilleur avec «les arbres cathédrales» déjà présents. Les îlots, avec pour chacun une thématique, réécriront l’histoire du lieu en le réenchantant. Le parc, conformément au vœu des Annéciens qui ont été consultés, demeurera calme. Enfin, en rapport avec cette consultation, l’un des bâtiments directeurs se trouvant du côté de la rue G. Fichet, sera conservé pour être dédié aux associations. Son pendant deviendra une résidence d’artistes. Les travaux préparatoires (enfouissement des réseaux, désamiantage du site) ont été effectués en ce début d’année, de même que des travaux de forage. Il en ressort que la production de chauffage et d’eau chaude pourra être couverte à 97% par la géothermie. «Nous allons également réduire les besoins énergétiques à la base, en travaillant sur l’isolation des bâtiments qui sera adéquate à leur usage. Par exemple, la halle gourmande ne sera pas chauffée, et nous conserverons les dispositifs de ventilation naturelle dans les anciennes écuries». «Par ailleurs, les bassins seront alimentés par de l’eau de pluie, et afin de pouvoir affiner au mieux les usages de l’eau sur le site, un suivi de la nappe sera mis en place», ajoute et conclut l’architecte.
L’appel d’offres pour la désignation des entreprises étant terminé, le premier coup de pioche sera donné en septembre 2023. Selon le calendrier prévisionnel, tout devrait être fin prêt pour accueillir le festival du film d’animation dès le mois de juin 2025.
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