Interview

Valais, terre d'accueil... en manque de logements

11.03.2025 à 16:23/ immobilier.ch News Valais

Le marché immobilier valaisan traverse une période de tensions. Entretien sur ces enjeux avec Benjamin Roduit, président de la Chambre Immobilière Valaisanne (CIV).

La forte demande de logements ne se limite pas aux grandes agglomérations comme Sion ou Martigny
La forte demande de logements ne se limite pas aux grandes agglomérations comme Sion ou Martigny - Copyright (c) DR
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Le taux de vacance est actuellement fixé à 1,4%, un niveau historiquement bas, révélateur d’une forte pénurie de logements. En parallèle, la propriété immobilière y est très élevée. 55% des Valaisans sont propriétaires de leur logement. Un chiffre qui grimpe à 70% si l’on inclut terrains, maisons et autres biens immobiliers, contre une moyenne suisse d’environ 40%. Cette situation s’accompagne d’une croissance démographique rapide. La population est passée de 300’000 à 375’000 habitants en quelques années, amplifiant encore la pression sur l’offre immobilière. Benjamin Roduit, Président de la Chambre Immobilière Valaisanne (CIV), s’exprime sur cette crise et les solutions à envisager.

Comment décririez-vous la situation actuelle du marché immobilier en Valais?

Le Valais attire toujours plus de nouveaux habitants, mais l’offre peine à suivre. La situation est donc tendue car cette forte demande de logements ne se limite pas aux grandes agglomérations comme Sion ou Martigny. Elle s’étend à toute la plaine du Rhône et aux communes de montagne où la situation est encore plus marquée pour les résidences principales et les secondaires. Alors que la demande est forte, les prix augmentent, rendant même l’achat de terrains inaccessible sur certaines communes.

Mon leitmotiv est simple: si l'on veut régler la crise du logement, il faut laisser construire

Quels sont les principaux freins au développement de nouveaux logements?

Mon leitmotiv est simple: si l’on veut régler la crise du logement, il faut laisser construire. Les contraintes administratives et réglementaires constituent un obstacle majeur. Les délais de traitement des dossiers peuvent atteindre deux à trois ans, ce qui dissuade bon nombre de promoteurs. De plus, certaines lois comme la Lex Weber et la Loi sur l’Aménagement du Territoire (LAT) imposent des restrictions qui limitent fortement les possibilités d’expansion. À cela s’ajoutent les défis liés aux infrastructures telles que les routes, les transports ou les services de proximité, qui freinent le développement de certaines zones, notamment dans les vallées latérales. La topographie valaisanne impose également des restrictions de hauteur dans certains villages, compliquant encore l’optimisation des projets immobiliers.

Quelles solutions sont envisagées pour accélérer la construction?

Benjamin Roduit, président de la Chambre Immobilière Valaisannediaporama
Benjamin Roduit, président de la Chambre Immobilière Valaisanne

Nous travaillons sur plusieurs axes. D’abord, la réduction des recours abusifs grâce à une réforme permettant de traiter les litiges directement au tribunal cantonal, limitant ainsi les délais d’attente. Ensuite, la LAT 2 va permettre de créer de nouvelles zones touristiques, facilitant ainsi le développement d’hôtels et de logements pour le personnel. Enfin, l’allègement des procédures en zone à bâtir pour les constructions de petite envergure, jusqu’à 400 m2, contribuera à fluidifier le marché. Par ailleurs, le Grand Conseil vient de traiter la loi sur les constructions, avec une attention particulière sur l’accélération et la simplification des procédures.

Comment le marché des résidences secondaires évolue-t-il face aux nouvelles taxes municipales?

Certaines communes, comme Crans-Montana, ont décidé d’augmenter les taxes sur les résidences secondaires. Cela pourrait affecter l’attractivité du Valais pour les investisseurs. Nous comprenons la volonté des communes de réguler le marché, mais il est crucial de trouver un juste équilibre afin de ne pas freiner l’économie locale, qui dépend en partie de ses propriétaires. En parallèle, les nouvelles législations fédérales concernant la fiscalité immobilière notamment la suppression de la valeur locative liée à un impôt sur les résidences secondaires, pourraient également influencer ce marché en incitant certains propriétaires à revoir leur stratégie patrimoniale.

Quel est le rôle de la Chambre Immobilière Valaisanne dans ce contexte?

La CIV joue un rôle de médiation entre les acteurs de l’immobilier et les autorités. Nous oeuvrons pour une meilleure adaptation des réglementations aux réalités du marché, notamment en défendant des mesures visant à réduire les obstacles administratifs et à simplifier les procédures. Nous accompagnons aussi les propriétaires et investisseurs en leur fournissant des conseils et en les informant sur les évolutions législatives. Un autre axe de travail concerne l’accès au financement. De nombreux investisseurs et propriétaires rencontrent des difficultés liées aux critères d’octroi de crédit, exigeant un minimum de 20% de fonds propres et une solvabilité basée sur un revenu trois fois supérieur au service de la dette. Nous plaidons pour des ajustements, en particulier pour les projets de rénovation énergétique des PPE.

La transition énergétique est un enjeu majeur pour l’immobilier. Quelles recommandations faites-vous aux propriétaires?

Il est crucial d’avoir une vision globale. Avant d’installer une pompe à chaleur ou tout autre système écologique, il faut analyser l’ensemble du bien: isolation, toiture, portes et fenêtres. Des aides existent pour accompagner ces transitions, mais elles doivent être bien planifiées pour être efficaces et rentables. Nous encourageons également les autorités à adapter les critères de financement afin d’inciter les rénovations dans les copropriétés et à renforcer les incitations financières pour les ménages souhaitant rénover leur logement.

Quelles perspectives pour le marché immobilier valaisan dans les années à venir?

Nous devons répondre à la demande tout en préservant l’identité du Valais. Le développement passera par une meilleure flexibilité réglementaire, des infrastructures adaptées et un soutien aux investisseurs prêts à construire. Un des défis majeurs sera également de renforcer les infrastructures locales, à savoir les transports, les écoles ou les services publics afin d’assurer un cadre de vie optimal pour les nouveaux arrivants et de favoriser un développement équilibré entre zones semi-urbaines et périphériques.